Une journée sportive EXTRA-ordinaire avec des patients diabétiques

Article publié le 18/04/2019

Une journée sportive EXTRA-ordinaire avec des patients diabétiques

…qui pourrait être accessible au plus grand nombre !

Ce sont Marion, Bernard, Joël, Olivier et Laurent. Un point commun les a réunis en cette magnifique journée du samedi 30 mars pour descendre la mythique Vallée Blanche, au départ du sommet de l’Aiguille du Midi à Chamonix : leur pathologie, le diabète de type 1.

Une superbe journée qui a été rendue possible grâce à l’initiative et à l’engagement du Dr Anne Mayer, diabétologue au CH de Chambéry, soutenue par la société ORKYN, prestataire de santé à domicile, branche santé de Air Liquide.

« C’est le sport qui m’a motivée pour faire partager la passion de la montagne avec des patients diabétiques et soutenir Anne Mayer, ainsi que l’association Diamachro dans laquelle elle est engagée, pour organiser cette journée avec des guides professionnels rattachés au bureau des Guides de Saint-Gervais Mont Blanc. » déclare Corinne Vermeersch, Dr en biochimie et responsable de la coordination des soins chez ORKYN (perfusion/nutrition/diabète).

L’Univers des possibles grâce aux nouvelles insulines et aux nouveaux dispositifs

« Avec les insulines de maintenant on se pique quand on veut » rappelle Bernard, 47 ans, diabétique depuis l’âge de 10 ans, qui à son actif a déjà le ralliement de Pékin en vélo avec le soutien de l’association Aide aux Jeunes Diabétiques (AJD).

« Le défi était de montrer aux jeunes que le diabète n’empêche pas de réaliser ses rêves » déclare-t-il, rappelant le leitmotiv de l’AJD « Il faut apprendre à gérer sa glycémie, et beaucoup de choses deviennent alors possibles ». Utilisateur de stylos à insuline, il a parfaitement géré son diabète lors de la descente de la Vallée Blanche, en laissant une légère hyperglycémie se faire juste avant l’effort physique qui est venu rétablir « naturellement » son taux de sucre à la normale. « Ma glycémie est montée durant la matinée car j’ai mangé un croissant en surcroit du petit déjeuner, mais je n’ai pas augmenté la dose d’insuline injectée en prévision de l’activité physique » explique-t-il.

« La pompe à insuline c’est génial pour les sportifs car ça permet de bien mieux gérer sa glycémie» déclare quant à elle Marion, 27 ans, hyper-sportive, reconnaissant que ce dispositif médical qu’elle utilise depuis 2 ans lui avait véritablement changé la vie. Il était en effet pour elle très difficile auparavant de gérer les injections avec ses stylos à insuline afin d’être bien dans la cible, et elle était régulièrement sujette à des épisodes d’hyperglycémie avec tous les risques induits. « Je me refusais à aller me cacher dans les toilettes pour pratiquer mon injection car cela fait référence à un comportement de toxicomane, et cette connotation était pour moi insupportable » explique-t-elle, ajoutant que se piquer en public, par exemple à table au restaurant, est tout aussi difficile. Membre du Club Alpin Français (CAF), elle affiche clairement son vœu le plus cher : démontrer à tous les diabétiques comme elle que leur passion du sport ne doit pas être entravée par la maladie.

Un protocole élaboré à la carte

« Le protocole pour l’activité physique est spécifique à chacun, et à chaque type d’activité physique, soit en résistance (anaérobie), soit en endurance (aérobie) ou mixte » indique Anne Mayer, médecin diabétologue au CH Chambéry. Ainsi est-t-il globalement conseillé de :

Débuter l’activité physique avec une glycémie entre 1,50 et 2 g/l
Mesurer la glycémie au minimum toutes les 30 minutes
Réduire les injections ou bolus d’insuline de 50% et/ou augmenter les glucides rapides du repas précédent (et sous pompe utiliser un débit temporaire réduit)
Prévoir des rations de 15grammes de glucides rapides pour resucrage si besoin. Utiliser par exemple une boisson sucrée : 10 cuillères à soupe de sirop (200ml), cad 150g de glucides pour 1 l d’eau, soit 2 gorgées (10 cl) équivalent à 15g de glucides
Prévoir de manger plus lors du repas du soir et diminuer les doses du soir de 20%

Côté préparation du matériel, évidemment on ne part pas à la légère pour s’engager dans une expérience comme celle de la descente de la Vallée Blanche. Anne rappelle quelques indispensables pour une sortie à la journée :

1 stylo d’insuline rapide, aiguilles, et 1 stylo d’insuline lente si pompe
Appareil lecteur+ bandelettes glycémie et acétone
Glucagen
Resucrages (au moins 6 pour une journée d’effort aérobie modéré) au choix : boisson sucrée, pâtes de fruits, barres de céréales, gourdes de compote, berlingos de lait concentré, bonbons…

Au-delà de cette journée de « démo » , la volonté pédagogique affichée était de permettre aux patients d’intégrer les bonnes pratiques dans leur vie quotidienne, les autonomiser …et en faire des « ambassadeurs » auprès d’autres patients. « Ces sorties sportives permettent aux patients de renforcer leur estime de soi et le sentiment d’efficacité personnelle, qui sont souvent altérés par la lourdeur d’une maladie chronique difficile à gérer au quotidien, l’isolement qu’elle procure et le regard des autres, souvent stigmatisant» souligne Anne Mayer.

Au final : ça se prépare !

Quelques règles hygiéno-diététiques au préalable :

Durant les mois précédents : activité physique régulière modérée à intense le plus souvent possible (3 à 5x/sem 45 min), alimentation et diabète équilibrés au mieux !
Les 3 jours précédents : repas riches en sucres lents
Le jour J : petit déjeuner et pique-nique riches en sucres rapides et en féculents

« Mon métier est d’accompagner, par le biais de séances éducatives et de pratique physique à l’hôpital, les personnes atteintes de maladies chroniques à s’emparer de l’activité physique comme un soin de santé » déclare Sophie Juglair enseignante en activité physique adaptée. Dans le cas du diabète, il s’agit donc d’amener les personnes, par des séances éducatives, à comprendre et tester les possibles adaptations pour différents types d’efforts, variables en intensité et durée. « L’objectif est de permettre un meilleur équilibre glycémique à l’effort afin de gérer hypo et hyperglycémies qui peuvent survenir pendant et après un effort » insiste Sophie.

Son conseil pour une préparation physique adaptée spécifique aux diabétiques : s’entraîner pour différents types d’efforts et observer les variations glycémiques en fonctions des adaptations testées. « Il est par exemple possible de réduire d’environ 50% un débit d’insuline basale 45 min avant la pratique afin que cette baisse soit effective lors du temps de pratique » indique-t-elle. Ou encore lors d’une séance de pratique physique proche d’un repas, il est possible de réduire le nombre d’unité d’insuline rapide lors de ce repas en regard de la pratique à venir. « Toute adaptation est propre à chacun, et dans le cadre des séances éducatives en APA nous testons ensemble les grandes lignes des recommandations, afin que par la suite la personne s’approprie et affine ses adaptations » conclut-t-elle.

« Ces sont véritablement les personnes, que ce soit au sein des services hospitaliers ou des entreprises qui nous soutiennent, qui sont moteur pour faire aboutir de tels projets » observe Laurent, d’emblée séduit par l’initiative et volontaire pour participer à la journée sportive du 30 mars. « Le diabète m’a permis de rencontrer de belles personnes, autant parmi le personnel médical que parmi les autres patients » ajoute Olivier, déclarant assumer à présent pleinement sa pathologie.

« Cela fait plaisir d’accompagner des personnes avec le sourire et un bon état d’esprit » déclare Stéphane Moussard, l’un des deux guides de haute montagne rattachés au Bureau des Guides de St Gervais (avec Pascal Chapelland) qui ont mené le groupe dans la Vallée Blanche.

« C’est une réelle satisfaction de pouvoir mettre en place un tel projet, de prime-abord inaccessible pour des patients diabétiques, mais surtout de développer des partenariats au long court avec les services hospitaliers, à l’instar de la collaboration établie avec le CH de Chambéry, grâce à la volonté d’un médecin aussi engagé et motivé que le Dr Anne Mayer » conclut Corinne Vermeersch, appelant de ses vœux de prochains projets d’envergure.